Cession de fonds de commerce ou de clientèle : formalités
Vérifié le 13/01/2020 - Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre), Ministère chargé de la justice
Un fonds de commerce est un ensemble d'éléments utilisés pour l'exploitation d'une activité commerciale ou industrielle. Ces éléments sont souvent inséparables et constituent la valeur du fonds. La vente d'un fonds de commerce ou de clientèle commerciale ou civile (pour les notaires, architectes, médecins, etc.) est soumise à des formalités d'enregistrement et au paiement de droits de mutation.
Les éléments suivants sont compris dans la vente du fonds de commerce :
Éléments incorporels (biens ou valeurs immatériels). Par exemple, clientèle, enseigne, nom commercial, droit au bail, contrats de travail, d'assurance et d'édition, enseigne, droits de propriété littéraire, artistique et industrielle (brevets, logiciels, marques par exemple), autorisations administratives (licences par exemple), nom de domaine, marchés en cours
Les éléments corporels (matériels) : matériel, mobilier, outillage. Ils doivent donner lieu à un inventaire détaillé et estimatif.
Il est conseillé de déterminer précisément quels sont les biens compris dans la vente afin de se prémunir contre tous litiges.
Un contrat de bail commercial peut s'opposer à une cession isolée du droit au bail, simple cession du pas-de-porte. Mais aucune clause ne peut priver un locataire de son droit de céder le bail au repreneur de son fonds de commerce. Même si ce droit peut dépendre d'une clause à l'agrément du bailleur, à son intervention à l'acte de cession. Ou encore d'une obligation pour le locataire cédant de se porter garant de la bonne exécution du bail par le cessionnaire, notamment en matière de paiement des loyers.
Attention :
lorsque des éléments du fonds de commerce sont vendus sans intention de céder l'exploitation, les juges peuvent assimiler la vente en cession du fonds de commerce, ce qui entraînera des conséquences notamment fiscales. Par exemple, le fait de céder une marque renommée à laquelle est rattachée une clientèle sera requalifié en vente du fonds de commerce.
Les éléments suivants ne sont pas transmis à l'acheteur du fonds (ou cessionnaire) :
Créances et dettes, sauf si l'acheteur ne respecte pas certaines obligations et dans le cas de la solidarité fiscale
Contrats (sauf ceux obligatoirement transmissibles)
Documents comptables (l'acheteur doit pouvoir consulter les 3 derniers exercices comptables pendant 3 ans)
Immeubles
Livres de commerces
Droit de terrasse d'un restaurant ou d'un débit de boissons (l'autorisation d'occupation du domaine public est délivrée à titre personnel au précédent exploitant : une nouvelle autorisation doit être demandée par l'acheteur du fonds)
À noter
les contrats de travail en cours, les contrats d'assurance et le droit au bail soumis au statut des baux commerciaux ne peuvent pas être exclus de la cession.
Dans une entreprise comportant jusqu’à 249 salariés, les salariés doivent être obligatoirement informés, en cas de projet de vente du fonds de commerce ou de l’entreprise (plus de 50 % des parts sociales d’une SARL ou d’actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d’une société par actions), au plus tard 2 mois avant la conclusion du contrat de vente.
Les salariés, tenus à une obligation de discrétion, ont ainsi le temps de proposer une offre de rachat du fonds de commerce, des parts sociales, actions ou valeurs mobilières, ou une offre de reprise de l’entreprise.
L’information préalable doit être transmise selon l’une des conditions suivantes :
Au cours d’une réunion d’information des salariés, avec signature d’un registre de présence
Affichage, avec signature d’un registre daté attestant avoir connaissance de cet affichage
Courrier électronique, avec une date de réception certifiée
Remise en mains propres, contre émargement ou récépissé
Lettre recommandée avec avis de réception (la date de réception de l'information étant alors celle de la première présentation de la lettre)
Acte d’huissier
Tout autre moyen de nature à rendre certaine la date de réception
Les cas suivants sont exclus du champ d’application de cette disposition :
Entreprises à partir de 250 salariés
Fonds artisanal, libéral ou rural
Transmissions réalisées dans le cadre d’une succession, d’une liquidation du régime matrimonial ou d’une cession du fonds à l'époux(se) ou partenaire de Pacs, à un ascendant ou descendant
Entreprises en cours de procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire
La vente ne peut intervenir avant l'expiration d'un délai minimal :
Dans les entreprises non soumises à l'obligation de mettre en place un comité social et économique (CSE), la réalisation de la vente ne peut pas intervenir avant un délai de 2 mois après que tous les salariés ont été informés de l'intention du propriétaire de vendre le fonds. Dans le cas particulier où le vendeur du fonds de commerce n'en est pas l'exploitant, le délai de 2 mois doit s'écouler entre la notification de la volonté de vendre à l'exploitant du fonds et la réalisation de la vente.
Dans les entreprises soumises à l'obligation de mettre en place un CSE, il n'est pas prévu de délai spécifique, la consultation obligatoire du CSE tenant lieu d'information. Les salariés doivent avoir reçu l'information concernant la volonté de vendre au plus tard en même temps que l'entreprise procède à la saisine du CSE sur le projet prévoyant la vente du fonds de commerce.
Par dérogation, la vente peut intervenir avant l'expiration des 2 mois dès lors que chaque salarié a fait connaître sa décision de ne pas présenter d'offre.
La vente doit intervenir avant l'expiration d'un délai maximal. Une fois tous les salariés informés, le vendeur dispose de 2 ans maximum pour réaliser la vente, sans avoir l'obligation d'informer à nouveau les salariés en cas de nouveau projet de vente.
Ce délai court :
Soit à compter de la date à laquelle tous les salariés ont été informés, dans le cas où l'entreprise a l'obligation de mettre en place un CSE
Soit à compter de l'expiration du délai de 2 mois, pour les entreprises non soumises à l'obligation de mettre en place un CSE
Attention :
si l'entreprise est vendue sans que les salariés aient été informés, ils peuvent saisir le juge pour demander des dommages et intérêts au vendeur. Ce dernier risque une amende dont le montant ne peut pas dépasser 2 % du montant de la vente. Des dommages et intérêts peuvent aussi être versés aux salariés en cas de préjudice causé par la faute du chef d'entreprise.
Si le bien cédé est situé dans le périmètre de sauvegarde des commerces et de l'artisanat de proximité, il peut faire l'objet d'un droit de préemption de la commune, c'est-à-dire du droit de l'acheter en priorité pour le rétrocéder à un commerçant ou un artisan.
Le maire dispose d'un délai de 2 mois pour exercer éventuellement le droit de préemption au profit de la commune. S'il exerce ce droit, 2 possibilités sont envisageables.
Si la commune et l'exploitant s'entendent sur un prix, la vente est conclue.
Si la commune et l'exploitant ne se mettent pas d'accord sur le prix, la commune peut renoncer à l'achat ou saisir le juge de l'expropriation (devant le tribunal judiciaire). Quant au vendeur, il peut renoncer à la cession.
Les formalités de publicité sont obligatoires et permettent de rendre la cession opposable aux tiers.
Déclaration dans un journal d'annonces légales (Jal)
La publication de la cession d'un fonds de commerce dans un journal d'annonces légales doit intervenir, à la diligence de l'acquéreur ou de la société bénéficiaire de l'apport, dans les 15 jours qui suivent la date de la vente ou de l'apport du fonds de commerce.
Publication au Bodacc
L'acheteur doit solliciter le greffier du tribunal de commerce dans un délai de 3 jours suivant l'insertion dans le Jal afin que celui-ci publie un avis au sein du Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc).
La publication permet aux créanciers de l'ancien propriétaire du fonds de s'opposer pendant dans un délai de 10 jours au paiement du prix de vente entre les mains de celui-ci. Une opposition qui est faite après ce délai est nulle et sans effet.
L'acheteur du fonds doit enregistrer l'acte de vente auprès du bureau de l'enregistrement du service des impôts de la situation du fonds.
L'enregistrement permet de déterminer le montant des droits qui devront être payés lors de la présentation de l'acte à la formalité.
Ils sont le plus souvent pris en charge par l'acheteur, même si l'acte de cession peut prévoir d'autres conditions (prise en charge par le vendeur ou partage des frais, par exemple).
Modèle de document Modèle de cession de fonds de commerce
Dans le mois qui suit l'acte de cession ou l'entrée en possession du fonds, l'acheteur du fonds de commerce ou de la clientèle doit effectuer son enregistrement auprès du service des impôts des entreprises (SIE), en déclarant la mutation du fonds de commerce ou de clientèle.
Cette formalité donne lieu au versement par l'acheteur de droits d'enregistrement (ou droits de mutation) perçus sur le prix de la vente de l'achalandage, de la cession du droit au bail et des objets mobiliers ou autres servant à l'exploitation du fonds.
L'acheteur du fonds de commerce doit, soit créer une nouvelle société, soit déclarer un établissement secondaire, dans le cas où il exerce déjà une activité.
Dans les 30 jours à compter de la première publication de la vente (45 jours concernant les non-redevables de la TVA), l'exploitant doit s'adresser au CFE dont il dépend pour son immatriculation et ses déclarations légales et administratives. Notamment au registre du commerce et des sociétés (RCS), au répertoire national des entreprises (Siren), aux services fiscaux et à la Sécurité sociale des indépendants (ex-RSI).
Service en ligne Portail de la publicité légale des entreprises (PPLE)
Le prix de vente du fonds de commerce peut être retenu pendant un délai de 105 jours à partir de la date de la vente, le temps que toutes les formalités soient accomplies. Ce délai est prolongé de 60 jours lorsque le vendeur ne dépose pas sa déclaration de bénéfice réel auprès des services des impôts dans les 60 jours qui suivent la date de publication de la vente au Bodacc.
Un séquestre (un avocat ou un notaire par exemple) peut être désigné pour conserver le produit de la vente ainsi bloqué et recevoir les oppositions des créanciers éventuels.
Le séquestre est le mandataire de l'acheteur du fonds de commerce. Il exerce donc sa mission dans l'intérêt de ce dernier. Par conséquent, les honoraires et frais du séquestre sont à la charge de l'acheteur si le contrat de vente ne prévoit pas autre chose.